Pour les biologistes, l’hybridation est un croisement d’espèces différentes. Les énergéticiens leur ont emprunté le concept pour évoquer le couplage de plus en plus fréquent de sources d’énergie différentes aux divers niveaux d’un système énergétique.
Avec l’intermittence sur les réseaux électriques des nouvelles énergies renouvelables électriques, éoliennes et solaires (ENRi) les volumes d’énergie à déplacer temporellement sont de plus en plus importants. Cette évolution ne peut que s’amplifier avec les baisses de coûts de ces kWh qui, compte tenu de l’organisation actuelle des marchés de l’électricité, deviennent de plus en plus compétitifs et s’imposent progressivement comme une solution économique viable, à l’échelle internationale, même après l’arrêt des schémas de soutien financier direct à leur développement (Lire : Énergie éolienne : De son gisement à ses aérogénérateurs et Énergie solaire : les bases théoriques pour la comprendre).
Dans ce contexte, il n’existe cependant pas de justification à ce que ces énergies continuent de bénéficier d’une priorité d’injection sur les réseaux électriques. Procurer un avantage sur la base d’une valeur du carbone évité serait plus pertinent s’il s’agit de promouvoir des productions décarbonées face à des productions carbonées, compte tenu de l’objectif de réduction d’émission de gaz à effet de serre (GES). Dans un souci de cohérence et d’efficacité des politiques publiques, cet avantage a vocation à être également procurée aux autres sources de production également peu carbonées, comme le nucléaire ou l’énergie hydroélectrique.
Pour comprendre cette problématique, il faut rappeler les conditions d’un bon fonctionnement du réseau électrique puis comparer toutes les technologies « dispatchables » pour s’interroger sur les modes de pilotage, le stockage et le croisement des vecteurs, avant de conclure sur les nouvelles approches de l’organisation des systèmes électriques.
1. Les exigences des réseaux électriques
Le fonctionnement du réseau électrique (Lire : L’électricité : éléments essentiels, génération et transport et Des réseaux électriques aux smart grids) ne consiste pas seulement à équilibrer la production électrique et sa consommation à chaque instant et à la planifier à l’échéance de chaque journée, chaque semaine, chaque mois, chaque année sur l’ensemble du pays. Le réseau électrique est en effet un système complexe constitué de multiples étages.
- Le grand transport (à très haute tension), développé historiquement de manière concomitante avec l’installation des grands sites de production comme les grands barrages et les centrales thermiques, permet l’acheminement à longue distance tant à l’échelle nationale qu’internationale via l’interconnexion avec les pays limitrophes. Cette interconnexion a été relativement précoce en France de l’entre-deux guerres, comparée à ses voisins, compte tenu de la localisation des grands centres de production (avant tout l’hydraulique des Alpes, du Massif Central et des Pyrénées ; et ensuite le thermique fossile du Nord et de l’Est) relativement aux grands centres de consommation (régions parisienne, lyonnaise, etc…). (Illustration possible : voir carte ci-dessous extraite de Histoire de l’électricité en France, tome II, 1994, ed. Fayard, page 822).
- La répartition régionale (à haute et moyenne tension) permet une répartition à grosse maille. Elle est prolongée par une distribution étoilée à tensions plus faibles, les gros clients, type SNCF, pouvant être connectés à ce niveau. Noter que l’essentiel des productions ENRi est connecté sur ce réseau qui, au départ, était prévu et optimisé pour une desserte de haut en bas (Figure 1).
- Le réseau basse tension, exploité par ENEDIS, assure l’acheminement électrique jusqu’à la majorité des clients, notamment les ménages. Parmi les ENRi, seul le solaire PV sur toit est raccordé à ce niveau de tension.
Dans ce système complexe, héritage technologique accumulé sur plusieurs décennies, de multiples équilibres sont à respecter à différents niveaux de granularité spatiale et temporelle. Outre l’équilibre global annuel, il faut assurer un équilibre temporel à tout instant, jusqu’à la minute, mais même très en deçà, afin de garantir la fréquence de l’onde électrique délivrée à tout instant (on parle d’équilibre dynamique du réseau). Du point de vue spatial, la tension doit être également garantie en tout point du réseau, ce qui peut être plus difficile dans des zones péri-urbaines ou rurales où les réseaux sont dits plus faibles car moins maillés.
Un modèle, courant dans les réflexions et commode pour l’analyse d’ordre premier est le modèle dit « plaque de cuivre » qui néglige toute la complexité de la gestion du réseau précédemment décrite. Dans le cadre de cette approximation, on dit souvent, non sans une certaine caricature, que l’énergie n’est pas une commodité puisqu’il faut savoir la produire au moment où elle est requise. Tous les MWh produits n’ont donc pas la même valeur d’usage. Pour faire très simple, lorsque la production n’est pas pilotable à la demande (cas des ENRi), il faut adjoindre au réseau soit des productions pilotables, soit des capacités de stockage d’énergie afin de pouvoir garantir à tout moment le service requis. Une bonne partie de l’hydro-électricité (barrages, éclusées, pompage) conjugue ces deux qualités. Une autre façon d’équilibrer le réseau, est de piloter certaines consommations effaçables ou reportables, sans rupture de service ou moyennant compensation. On parle plus génériquement sur les réseaux électriques de flexibilité permettant d’équilibrer à tout moment les productions et les consommations. La dimension supplémentaire soulignée ici est que cette flexibilité déjà nécessaire dans un modèle « plaque de cuivre » prend un sens plus important encore lorsque l’on intègre l’ensemble des besoins techniques pour le bon fonctionnement du réseau électrique. On parle alors génériquement de « services réseau » pour tous les besoins nécessaires temporellement, localement pour le réseau (Lire : Les marchés électriques et Stockage hydraulique et production d’électricité).
2. Les productions pilotées (ou dispatchables)
Parmi les flexibilités disponibles sur les réseaux électriques, figurent toutes les technologies de production pilotée. Les centrales thermiques à flamme ne sont pas décarbonées mais constituent une référence. Les centrales à gaz, qui accompagnent le déploiement des ENRi, permettent une réduction significative des émissions de GES dans les systèmes électriques initialement majoritairement fossiles. Elles ne sont pas décarbonées, mais elles font figure de référence pour leur qualité de variation dynamique de puissance fournie : les cycles dit combinés, avec des rendements jusqu’à 60% sont en mesure d’assurer des variations de 8 à 10% de leur puissance nominale par minute (PN/min). Les centrales à gaz dites à cycle ouvert ont un rendement énergétique inférieur (40%) mais elles sont aptes à des variations jusqu’à 20% de PN/min (Figure 2).
Les centrales nucléaires françaises (Lire : Les réacteurs nucléaires) constituent un parc de production décarbonée et pilotable. Elles sont réglementairement limitées à 5% de variation de PN/min, avec des restrictions dépendant de l’état d’avancement de la consommation du cœur d’une part, et de l’historique des variations des heures précédentes d’autre part. Les profondeurs de réduction de puissance peuvent descendre jusqu’à 20% de la puissance nominale sur un cœur donné (en début de cycle du combustible, jusqu’à 65% de ce cycle), et l’arrêt complet d’une tranche est toujours possible, moyennant une temporisation de l’ordre d’une demi-journée avant redémarrage. Malgré ces limitations, en France, compte tenu du nombre de réacteurs et de la puissance totale installée, le nucléaire est de loin la première source de flexibilité technique en volume (Figure 3).
La ressource renouvelable biomasse serait une autre ressource potentiellement pilotable au même titre qu’une centrale à flamme. La ressource biomasse reste cependant limitée, et précieuse car en conflit d’usage potentiel pour d’autres applications (alimentaire ou matériaux bio-sourcés, entre autres). Les estimations peuvent varier en France de 20 Mtep selon certaines sources, jusqu’à 120 Mtep dans certaines publications optimistes (Lire : Biomasse et énergie : des ressources primaires aux produits énergétiques finaux).
Par ailleurs, il est généralement plus économique d’utiliser cette ressource (aujourd’hui près de 10 Mtep en bois énergie et 2 Mtep environ en bio-carburant) en chaleur finale plutôt que la convertir en électricité. En outre, son aspect décarboné, du fait de son caractère renouvelable, nécessite des analyses de cycle de vie (ACV) complets détaillés. Il semblerait que selon l’organisation mise en place, les multiples besoins liés à la récolte et au transport de la matière primaire pénalisent en partie le bilan GES net de l’activité.
Reste l’hydraulique qui est une production pilotable mature et décarbonée représentant plus de 15% de l’énergie électrique mondiale, environ 20% de la capacité de production électrique installée en France (23 GW), et plus de 10% de l’énergie électrique produite. La maturité de cette production renouvelable ne doit pas occulter les potentiels besoins d’évolution sur les groupes de production, sur les sites existants, pour les faire gagner en vitesse et profondeur de flexibilité (Lire : La réhabilitation des centrales hydroélectriques : Une vraie opportunité).
3. Le pilotage des demandes électriques
L’avènement des technologies du numérique ouvre une dimension nouvelle pour le pilotage des consommations. Le concept n’est pas nouveau : tarifs incitatifs, chauffe-eau électrique, pilotage de certaines activités industrielles guidés par la recherche de réduction de coût de l’énergie (Lire : Le numérique, outil d’optimisation des factures électriques et Le numérique : de l’éclairage public efficace à la ville connectée). La numérisation progressive de l’ensemble du système électrique, assorti éventuellement d’aménagements locaux devrait cependant permettre un pilotage plus fin des appels de puissance sur les réseaux.
Cette évolution procède cependant, en partie, du renvoi de la flexibilité vers les clients finaux, avec des avantages et des inconvénients. L’avantage est la responsabilisation de chacun, ménage ou industriel, sur le pilotage et le financement de sa consommation. L’avantage est aussi d’encourager les optimisations énergétiques locales, comme le stockage thermique ou, à l’avenir, la gestion de charge optimisée d’un véhicule électrique. L’inconvénient est une éventuelle sous optimalité technique et économique, par exemple en cas de recours mal coordonné au stockage électrique des batteries localisées chez le client final. Dans le cadre d’une vision d’ensemble technique, faudra-t-il favoriser des stockages répartis chez chaque client ou ceux raccordés directement au réseau et gérés collectivement au niveau des postes sources ?
4. Le stockage d’énergie
À ce jour, l’hydraulique est sans conteste, et de très loin, la première source mondiale d’énergie renouvelables sur les réseaux électriques. En France, son pilotage porte sur un stock de 2 à 3 TWh concernant les seules éclusées. Pour les grands barrages, ce stock est renouvelé de trois à quatre fois par an, selon les conditions de précipitation et d’enneigement, pour une production totale de plus de 10 TWh annuels (pour mémoire, une journée de consommation française, va de 0.7 à 2 TWh).
Derrière l’hydraulique bénéficiant d’apports naturels, l’hydraulique des stations de pompage turbinage dites station de transfert d’énergie par pompage (STEP) reliant deux réservoirs à des altitudes différentes (Lire : Les stations de pompage (STEP)) constitue la seconde source de stockage d’électricité mondiale, très loin devant le stockage thermochimique (batteries) ou le stockage à air comprimé[1]. En France, la puissance des STEP avoisine 5 GW. L’énergie contenue est la qualité première (loin devant celle des batteries) pour les besoins de flexibilité liés à la variabilité de production des ENRi. En France, elle atteint 0.1 TWh, dont la moitié provient de la STEP de Grand Maison (Tableau 1).
Tableau 1 : Les STEP en France.
Grand’Maison | Montézic | Revin | S. Bissorte | La Coche | Le Cheylas | Total | |
Hauteur de chute | 922 /955 m | 423 m | 250 m | 1160 m | 927 m | 261 m | – |
Puissance turbine | 1,79 GW | 0.91 GW | 0.72 GW | 0.73 GW | 0.33 GW | 0.46 GW | 4.9 GW |
Energie Disponible | 54 GWh | 36 GWh | 3.6 GWh | 3.5 GWh | 1 GWh | 2.76 GWh | 100,8 GWh |
D’après X. Ursat http://ecolo.org/documents/documents_in_french/STEP-en-France-Ursat-2011.pdf. L’énergie disponible est librement estimée ici comme le produit de la puissance turbine par la constante de temps. Revin et Montézic sont des STEP pures, alors que toutes les autres sont des STEP bénéficiant aussi d’apport gravitaire.
Ces capacités de stockage dominent largement celles de tout autre mode de stockage électrique. En revanche, à l’avenir, elles interviendront en complémentarité et spécificité avec de nouvelles technologies. Ainsi, deux millions de véhicules électriques supposés connectés complètement au réseau et mettant chacun 20 kWh à disposition représenteraient une ressource théorique de 40 GWh, soit l’ordre de grandeur d’une grande STEP. Cette comparaison reste évidemment théorique car il faudra imaginer des développements technologiques et d’infrastructure significatifs pour connecter ainsi de manière réversible les véhicules électriques, et aussi trouver des modes d’interaction confortables et incitatifs pour les usagers (Lire : L’automobile du futur : quelle source d’énergie ? et L’automobile du futur : les technologies énergétiques en compétition).
5. Les croisements de vecteurs
Qui dit stockage d’électricité, dit toujours, en réalité, conversion de vecteurs énergétiques, sauf dans le cas particulier des condensateurs. Dans le cas des barrages, l’énergie électrique est convertie en potentiel gravitaire, dans le cas des batteries, l’électricité est convertie en potentiel électrochimique.
En revanche, lorsque l’électricité est utilisée en moyen de chauffage ou en moyen de production d’hydrogène par électrolyse, on peut réellement parler de croisement de vecteurs pour plusieurs raisons :
- ces formes d’énergie sont également directement utilisables par les consommateurs ce qui incite, autant que possible, à conserver l’énergie pour consommation sous la forme stockée afin d’éviter les pertes de rendement énergétique inévitables à chaque conversion ;
- il existe aussi des réseaux véhiculant l’énergie sous cette autre forme stockée, un couplage optimisé des réseaux de vecteurs énergétiques différents serait donc possible : couplage électrique, gaz, chaleur.
5.1. Couplage électricité chaleur
Ce couplage n’est évidemment pas nouveau dans son principe. Le pilotage en France d’environ 14 millions de chauffe-eau électriques permet un stockage de plus de 20 GWh produits sous pilotage par le réseau, aux moments jugés les plus favorables de la journée[2]. L’effet sur la modification de la courbe de charge nationale d’électricité est manifeste.
Cette électricité est convertie en eau chaude dont la conservation est potentiellement d’un à deux jours et utilisée directement sous cette forme. Cela est vrai également des inerties thermiques des bâtiments, dalles chauffantes, par exemple, d’où la tendance encouragée dans le bâtiment d’optimiser les inerties thermiques, soit dans les structures, soit même à l’avenir, dans des stockages thermiques spécialement optimisés pour des durées pertinentes jusqu’à l’inter-saisonnalité (Figure 5).
5.2. Couplage électricité gaz
Il existe désormais des projets de synthèse de gaz à partir d’énergie électrique : hydrogène par électrolyse de l’eau , suivie de synthèse poussée plus loin vers des chaînes carbonées plus faciles à utiliser. Il n’est pas exclu d’envisager ces systèmes de façon réversible, mais là aussi pour minimiser les pertes de conversion, il faudrait privilégier l’usage de l’énergie sous la forme stockée. En 2019, en France, environ 120 TWh de stockage sont disponibles sur les réseaux de gaz naturel (soit 120 000 GWh !!). Par rapport aux volumes de capacité de stockage cités précédemment, même pour des rendements de conversion médiocres, l’intérêt unique de ce croisement de vecteurs est évident.
5.3. Couplages forts
Afin d’optimiser les rendements de conversion, c’est une combinaison d’électricité, de chaleur et de gaz qu’il faut mettre en place. À preuve, une électrolyse à basse température gagne 20% de rendement si une source chaleur à plus de 300°C est disponible. Parmi d’autres sources de production, et un peu plus uniquement pour ce qui est du stockage électrique de masse, l’hydroélectricité et le nucléaire représenteront donc un atout décarboné et pilotable de choix dans ce type de croisements énergétiques.
6. Besoins de service réseau : du national au régional
Les besoins de service réseau électrique cités plus haut, ainsi que les opportunités de production en complémentarité avec d’autres sources, existent à l’échelle du réseau national de manière plus ou moins répartie selon la disponibilité des sites. Ceci se décline tout autant à des échelles plus régionales. Compte tenu d’un contexte sociétal d’aspiration plus régionale et de sources de production ENRi plus réparties sur le territoire que les sources traditionnelles (centrales thermiques), les équations économiques devraient être reprises aussi pour la petite et moyenne hydraulique. Des projets de sites qui avaient été jugés non rentables par le passé pourraient le redevenir à la lumière des nouvelles aspirations mais aussi de coûts de la concurrence plutôt plus élevés que par le passé, une fois intégré l’ensemble des besoins systèmes.
L’un des besoins de service réseau à expliciter est lié à l’introduction grandissante de systèmes connectés au réseau par électronique de puissance. Cela est le cas d’un nombre grandissant de dispositifs consommateurs (moteurs à commande numérique, technologies de l’information, entre autres) ainsi que de dispositifs de production (onduleurs/hacheurs en sortie de champ éolien ou de ferme solaire PV au sol). Cette électronique de puissance change radicalement le comportement d’ensemble du système électrique face à une perturbation, par rapport à la situation ou l’essentiel des systèmes connectés étaient des machines tournantes. Ces dernières bénéficient en effet d’une inertie de rotation qui a un impact stabilisant sur les excursions de puissance en cas de déséquilibre subit de l’équilibre production/consommation du réseau. Il est vrai qu’il est possible d’émuler ce comportement par un pilotage adéquat de l’électronique, assorti d’un stockage d’énergie électrique également piloté de manière adéquat (on parle alors d’inertie synthétique). Le plus simple à ce jour reste cependant de disposer de moyens de production à machines rotatives, apportant une inertie réelle. C’est tellement vrai d’ailleurs que, dans certains cas, d’anciennes machines rotatives sont laissées connectées au réseau sans les adosser à un moyen de production, rien que pour maintenir cette capacité inertielle qui rend le système plus résilient. Tant qu’à faire, l’adosser à un productible hydraulique peut donc faire grand sens.
7. De nécessaires approches systémiques, analyses de cycles de vie et systèmes numériques
Au travers des éléments techniques et contextuels cités précédemment, on conçoit donc à quel point il faut se méfier des évidences. Il convient pour chaque étude d’effectuer des analyses système à large champ, incluant tous les modes de production, tous les modes de consommation, tous les vecteurs énergétiques couplés et en prenant bien soin de vérifier que les objectifs initiaux de mise en place sont bien confirmés par une analyse de cycle de vie complète des systèmes développés et mis en œuvre.
De telles études existent en partie, mais elles restent plutôt assez rares. Sur le plan strict du réseau électrique, il faut citer celle effectuée par EDF autour du code Continental. La version reprise par RTE, nommée Antares, a intégré progressivement le couplage des réseaux électriques à des réseaux de gaz. C’est d’ailleurs cet outil qui a été utilisé pour l’établissement des scénarios RTE (Figure 7). Doivent aussi être cités, entre autres, les codes Méthys (Artélis) ; Times Markal (Agence internationale de l’énergie- AIE) ainsi que l’étude Kombikraftwerk de l’Institute for Wind Energy and Energy System Technology (IWES) en Allemagne.
Encore une fois l’hydraulique, compte tenu de la grande longévité -plusieurs décennies-, des équipements existants, bénéficiera sans aucun doute de résultats très favorables à l’aune des analyses de cycle de vie. Cela ne doit pas masquer une difficulté corollaire, qui est celle des financements d’investissement de très long terme sur de telles installations.
Une fois les optimisations souhaitables déterminées par de telles analyses, effectuées avec un indispensable recul, il faudra déployer les systèmes numériques adéquats pour effectuer les divers pilotages en temps réel nécessaires. Il conviendra aussi de leur adjoindre le niveau de cyber-sécurité adapté à un système que l’on devra considérer comme un système névralgique pour le pays. L’hydraulique n’échappera pas à cette règle et il faudra maintenir à jour aussi les systèmes de commande et de monitoring des installations hydrauliques.
Conclusion : Penser aussi déploiement industriel et exportation
Loin des controverses qui, trop souvent étouffent les débats sur les optimums des systèmes énergétiques, il semble fondamental de penser aussi déclinaison industrielle, marchés à l’international et exportation.
À ce titre, le savoir-faire historique français sur les technologies hydrauliques est un joyau qui doit continuer à être cultivé, pour conserver le niveau de nos technologies à l’état de l’art, et pouvoir envisager non seulement des déploiements utiles en autonomie nationale et européenne, mais aussi permettre d’assumer une ambition compétitive et conquérante à l’export, de systèmes énergétiques multi-composantes, bien adaptés à la réalité de chaque client international.
Notes et références
[1] En dehors de l’hydraulique à apports naturels en eau (plus de 1100 GW installé dans le monde), le parc mondial existant en 2018 de stockage d’électricité est de l’ordre de 200 GW, dont plus de 180 GW de STEP. Source : US DOE, Global Energy Storage Database.
[2] Ce chiffre dépend du besoin de réchauffe quotidien et tient compte de la réalité des consommations : Pour un unique Chauffe-eau de 200l, l’énergie totale de chauffe de 20 à 60°C est de l’ordre de 10 kWh. 14 millions de chauffe-eau ce serait donc en principe plus de 100GWh ! Dans son Bilan prévisionnel 2017, RTE indique pour 2016 une consommation de l’eau chaude sanitaire de l’ordre de 19 TWh, soit 12% de la consommation d’électricité des ménages (source RTE BP 2017, page 39).
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